Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème RSEE INTERNATIONALE
 Pays MONDE  Date septembre 2016

Risque éthique : les droits des travailleurs se dégradent dans le monde

Synthèse : Selon le rapport 2016 de la Confédération Syndicale Internationale (CSI), les droits des travailleurs se sont affaiblis dans toutes les régions du monde cette année. Et si les pays de sourcing en Asie sont particulièrement représentés en bas de classement de l'indice CSI, ceux du Moyen-Orient et d'Europe de l'Est présentent des situations très préoccupantes... Un contexte général qui amplifie le risque RSE pour les supply chains internationales.

L'indice CSI classe les pays sur une échelle de 1 à 5+, selon que les violations des droits des travailleurs y sont sporadiques ou structurelles (voir carte ci-contre).

Par rapport à 2015, l'indice CSI enregistre une aggravation des conditions dans 18 pays sur 141 : c'est notamment le cas de l'Indonésie, déjà répertoriée parmi les pires pays pour les travailleurs et régulièrement montrée du doigt par l'OIT.

Si l'on écarte du panel principal les pays en crise (guerre, insurrection, terrorisme,...) où l'absence d'Etat de droit justifie à lui seul la note de 5+, le fond du classement (indice 5) est évidemment constitué d'un grand nombre de pays en développement dont l'économie est fortement basée sur une main d'œuvre à bas coût : en Asie (Bangladesh, Cambodge, Chine, Inde, Pakistan,...), en Afrique subsaharienne (Swaziland, Zambie et Zimbabwe), ainsi qu'au centre et au sud du continent américain (Colombie et Guatemala).

Mais ce qui saute aux yeux dans ce "Best Of" des pires endroits au monde pour les travailleurs, c'est le nombre de pays d'Afrique du Nord et du Moyen-Orient qui y figurent : Algérie, Arabie-Saoudite, Egypte, Emirats Arabes Unis (EAU) et Qatar partagent également la plus mauvaise note... avec la Turquie !

On remarquera par ailleurs que les pays occidentaux, bien que faisant plutôt partie du haut du tableau, bénéficient de notes disparates : France et Allemagne (1), Canada (2), Royaume-Uni et Espagne(3), États-Unis (4) !
Le rapport de CSI souligne d'ailleurs une tendance récente à un recul des droits des travailleurs en Europe (Finlande, Royaume Uni et Grèce) et tout particulièrement en Europe de l'Est où une aggravation sensible est observée en 2016 en Serbie, Bosnie-Herzégovine, Bulgarie, Croatie, Monténégro et Lettonie. Hormis la Grèce qui constitue un cas à part, la Biélorussie et l'Ukraine restent les pays d'Europe les plus mal classés (5) en raison des pratiques de travail forcé et de répression.

Une tendance alarmante pour l'ensemble des chaînes d'approvisionnement dans le monde, alors que l'Organisation Internationale du Travail (OIT) vient d'adopter en juin une résolution visant à promouvoir le travail décent pour tous, y compris pour le large secteur informel (sujet Atmosphère Internationale en préparation).

* Rapport "INDICE CSI DES DROITS DANS LE MONDE : les pires endroits au monde pour les travailleurs et les travailleuses" (CSI - 2016) à disposition de nos abonnés sur simple demande.
Avis de l'expert : Un bilan préoccupant, mais qu'il convient d'affiner par une approche contextuelle : les problématiques économiques, politiques et socioculturelles ne sont pas les mêmes dans une usine américaine et dans un atelier clandestin en Haïti, ou dans une entreprise du bâtiment à Oman... même si ces trois pays obtiennent l'indice très médiocre de 4 au classement CSI !

On peut en revanche trouver de nombreux points communs sur les conditions des travailleurs de zones géographiques très éloignées telles que l'Asie et l'Europe de l'Est : dans les deux cas, on retrouve des conditions de travail impactées par les stratégies de sourcing low-cost, et par un manque de volonté et/ou de marge de manœuvre politique pour encadrer les pratiques de travail forcé, voire d'esclavage moderne (cf. Atmosphère Internationale d'août 2016).

Cette notion d'esclavage moderne est également fortement présente dans de nombreux Etats du Moyen-Orient où les travailleurs migrants sont littéralement spoliés de leurs droits fondamentaux : une situation déjà mise en relief par l'ONG internationale "Walk Free" dans son "Global Slavery Index 2016" (cf. Atmosphère Internationale de juin 2016).

Un contexte bien différent des pays occidentaux, où la crise économique et les politiques d'austérité qui en découlent engendrent, selon la confédération syndicale, une dégradation des acquis sociaux.

Globalement, les pays où règnent la violence contre les travailleurs syndiqués (Colombie, Indonésie, Ukraine,...), l'exclusion ou la restriction du droit de grève, de la liberté syndicale et de la négociation collective (Chine, Turquie, Cambodge,...) sont clairement identifiés depuis longtemps.

D'ailleurs, l'exigence de respect de la liberté syndicale et du droit à la négociation collective est bien inscrite dans tous les codes de conduite de RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) et initiatives internationales : elle s'appuie sur la référence aux deux conventions fondamentales de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) n°87 et 98.

Si ces libertés sont restreintes par la loi locale, généralement en raison d'un système syndical centralisé et étatisé comme en Chine, l'entreprise donneuse d'ordre peut inciter ses fournisseurs à favoriser la représentation salariale et le dialogue social sous toute autre forme : élection d'un comité de travailleurs, réunions régulières entre management et représentants élus des salariés, discussions au sein du CHSCT, etc.

Néanmoins, force est de constater que lorsqu'elles travaillent sur les plans d'actions correctives à l'issue des audits sociaux réalisés chez leurs fournisseurs, la plupart des entreprises s'attachent d'abord à l'amélioration des non-conformités les plus problématiques que sont le manque d'hygiène et de sécurité, le non-respect du salaire minimum légal, la discrimination et le travail forcé,... car l'inexistence de la représentation salariale parait moins prioritaire.

C'est méconnaître l'importance de ce levier d'amélioration des conditions de travail au quotidien, y compris sur les aspects salariaux (salaires et bénéfices sociaux).

A un niveau plus macro, les accords-cadres mondiaux entre syndicats internationaux et grandes entreprises donneuses d'ordre de tous les secteurs industriels (agro-alimentaire, téléphonie, énergie, textile) soutenus par les plans d'accompagnement mis en place par les organisations internationales comme l'OIT (cf. Atmosphère Internationale de septembre 2014) ou la Banque Mondiale (cf. Atmosphère Internationale de février 2015) ont déjà fait preuve de leur efficacité.

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A consulter en ligne > Enregistrement vidéo du 12/07/2016 :
Les enjeux humains du sourcing international
Imprimer  S. THONNERIEUX / M. ANTIER
Source(s) : www.novethic.fr (septembre 2016)
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