Synthèse : Selon un rapport publié
en juin 2016 par une ONG anglaise, les conditions de travail des ouvriers
de la filière chaussure-habillement dans plusieurs pays d'Europe
de l'Est sont préoccupantes : le niveau de risque éthique
du "Made in Europe" y serait parfois supérieur à
certains pays d'Asie. Attention : la proximité géographique
n'exclut pas la vigilance RSE !
D'après les résultats de l'enquête de terrain*
réalisée par "Labour behind the label" (Travail
derrière l'étiquette) dans 12 usines de chaussures
en Pologne, Roumanie, Slovaquie, Albanie, Bosnie-Herzégovine
et Macédoine, nombreux sont les ouvriers européens
exposés à des conditions de travail illégales
au regard des conventions internationales et des lois nationales
:
- Très faible niveau de salaire : parfois en-dessous du
salaire minimum légal déjà très bas
dans le secteur chaussure (de 140 €/mois en Albanie à
354€/mois en Slovaquie) et jusqu'à 30% inférieur
au "living wage" (salaire vital)... un écart
plus important qu'en Chine !
- Forte pression sur les objectifs de production (travail à
la pièce) : heures supplémentaires excessives, non payées,
difficultés pour prendre ses congés annuels ou jours
fériés, etc.
- Couverture sociale partielle ou inexistante
- Représentation syndicale absente ou inefficace
- Conditions d'hygiène et de sécurité souvent
mauvaises
- Risques sanitaires liés à l'utilisation fréquente
de produits chimiques : manque de formation, absence de protection
individuelle, etc.
- Importantes inégalités homme/femme : au niveau salarial
(jusqu'à -50% à travail équivalent en Slovaquie
!) et social (soumission, dépendance)
- Etats défaillants dans leur rôle d'inspection et de
contrôle, et absence de débat national sur l'amélioration
des conditions de travail et des relations inter-genres
Albanie, Bosnie-Herzégovine et République Yougoslave
de Macédoine, trois proches voisins de l'Union européenne,
sont jugés particulièrement éloignés des
standards et normes en matière de respect des droits fondamentaux
des travailleurs. L'étude souligne l'impact néfaste
du recours massif des donneurs d'ordre communautaires au régime
du Perfectionnement Passif (PP) via les usines low-cost de
ces pays non soumises à la réglementation UE.
Mais la Roumanie, Etat membre de l'UE, est également très
fortement pointée du doigt par le rapport... et la Pologne
et la Slovaquie sont loin d'être hors de cause !
Le rôle de l'Union européenne est jugé prépondérant
par l'ONG pour obtenir notamment la mise en place d'un salaire minimum
obligatoire fixé à 60% du salaire moyen européen.
* Rapport "Labour on a shoestring" (2016) à disposition
de nos abonnés sur
simple demande. |
Avis de l'expert :
Pas besoin d'aller au bout du monde pour trouver des mauvaises
conditions de travail ! C'est l'un des messages qui émane
de cette étude approfondie réalisée par
un membre du réseau Clean Clothes Campaign et étayée
par 179 témoignages dans les 6 pays ciblés...
Une constatation déjà faite en 2014 (cf. Atmosphère
Internationale de juin 2014), mais qu'il apparaît
bon de rappeler tant la notion de risque éthique pour
les opérateurs du commerce international semble aujourd'hui
presque exclusivement associée au sourcing en Asie
!
Au niveau des entreprises, beaucoup de celles engagées
dans une politique RSE à l'international ont d'ailleurs
tendance à écarter l'Europe de leur cartographie
des risques sociaux, éthiques et environnementaux...
et nombreuses sont celles qui ne réalisent des audits
de contrôle qu'en Asie !
Une erreur potentiellement dommageable car le devoir de vigilance
et de diligence raisonnable couvre l'ensemble des maillons des
supply chains, sans distinction géographique !
Pour les pays d'Europe de l'Est il est particulièrement
recommandé de contrôler en priorité auprès
des fournisseurs et sous-traitants :
- Le niveau de salaire par rapport au minimum légal
et au living wage moyen, son mode de calcul (horaire / à
la pièce, heures supplémentaires,...) et la
régularité des versements
- Le traitement des femmes et les éventuelles discriminations
dont elles peuvent être victimes
- Les mesures d'hygiène, de sécurité
(bâtiments, incendie,...) et de protection
L'entreprise doit également accompagner ses fournisseurs
dans leurs actions correctives, et favoriser l'émergence
de rapports équilibrés entre employeurs et salariés.
Enfin, il apparaît primordial que la démarche RSE
de l'entreprise (plan de vigilance) soit connue et partagée
par l'ensemble des acteurs, particulièrement les acheteurs
susceptibles d'émettre des demandes ou des injonctions
contradictoires auprès des sous-traitants.
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