Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème REGLEMENTATIONS DOUANIERES
 Pays FRANCE / UE / MONDE  Date avril 2016

Fret express et douane française : une coopération (ren)forcée ?

Synthèse : En 2015, le volume de flux en fret express et postal à l'importation en France s’élève à plus de 70 millions d’envois... soit une augmentation de près de 60% en 4 ans ! La DGDDI enregistre pour sa part un véritable "boom" des saisies de produits illicites l'an passé. Pour accroître son efficacité au sein d'une filière logistique qui comporte des spécificités opérationnelles, une convention de coopération entre la Douane et l'Union Française de l'Express (UFEX) a été signée ce 6 avril : un rapprochement qui se veut gagnant-gagnant mais dont les enjeux économiques, sécuritaires, sanitaires et fiscaux dépassent largement le seul cadre de la lutte contre les trafics...

Stupéfiants (+240% de saisies par rapport à 2014), contrefaçons (+49%) et cigarettes d'importation sont les principales cibles des contrôles de l'administration douanière dont les moyens d'action ont été renforcés par de récentes dispositions règlementaires.

L'article 66 de la loi du 11 mars 2014 sur la lutte contre la contrefaçon donne aux agents " l'accès aux locaux des prestataires de services postaux et des entreprises de fret express […] où sont susceptibles d'être détenus des envois renfermant ou paraissant renfermer des marchandises se rapportant [aux] infractions [prévues au code des douanes] ".

D'autres mesures concernant le tabac (dont l'achat à distance est proscrit en France depuis fin 2014) sont récemment venues accroître les prérogatives des douanes en matière d'intervention sur les chaînes logistiques des expressistes et services postaux.

Ces dispositifs légaux s'inscrivent dans une démarche de renforcement des actions de lutte contre la fraude initiée en 2012.

La Convention de coopération DGDDI - UFEX prévoit la mise en place de dispositifs de détection des infractions douanières sur les flux d'importation des opérateurs du fret express.
L'objectif principal étant de limiter les opérations de contrôle afin de ne pas entraver les flux logistiques dont la valeur ajoutée repose essentiellement sur la rapidité opérationnelle, tout en améliorant l'efficacité et la réactivité de l'administration.

Les autres dispositions de la Convention appellent à une collaboration fondée sur des obligations concrètes : elles obligent les expressistes à faciliter l'accès des agents des douanes aux sites opérationnels, à leur apporter le soutien logistique et matériel demandé, et même à bloquer certains envois à destination de la France en provenance de comptes identifiés.

* DGDDI : Direction Générale des Douanes et Droits Indirects
Avis de l'expert : Les flux internationaux de fret express comportent au moins deux spécificités par rapport au transport international "conventionnel" : des délais d'acheminement très courts (le transport aérien étant systématiquement privilégié pour les envois longue distance), et une forte fragmentation des volumes (colis de faible taille, individuels ou en petits lots). Il en résulte un foisonnement ininterrompu de mini-opérations, extrêmement difficiles à passer au crible par les services administratifs en charge du contrôle réglementaire (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2015)...

Des contrôles qui, à l'instar de toute opération d'importation en provenance d'un pays tiers à l'UE, peuvent concerner bien d'autres aspects que la seule nature (licite ou non) des marchandises : Biens à Double Usage (BDU), réglementation REACH, conformité aux normes françaises et communautaires de sécurité et d'étiquetage,... la liste est longue !

La lutte contre la contrefaçon (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2014) se positionne à la fois sur le volet économique (manque à gagner des entreprises concurrencées par des copies illicites) et le volet sécurité des consommateurs (risques liés à la malfaçon), autre mission de l'administration douanière française qui alimente depuis 2005 le système communautaire d'alerte rapide sur les produits dangereux (RAPEX).

La sécurisation de la chaîne logistique internationale face à la menace terroriste (normes SAFE) est une autre mission qui mobilise fortement les agents des douanes et justifie leur "ingérence" chez les opérateurs de fret express.

Enfin, notons sans cynisme qu'une meilleure supervision réglementaire des flux commerciaux en fret express devrait, à terme, augmenter les rentrées fiscales de l'Etat (cf. Atmosphère Internationale de juillet 2015), car le format "messagerie" des lots qui transitent sur les plateformes des expressistes peut permettre encore actuellement d'espérer passer à travers les mailles du filet, notamment concernant la valeur déclarative (assiette de calcul des droits et taxes), l'origine douanière (préférentielle et non préférentielle), et le classement tarifaire (nomenclature douanière) des produits...

Pour les opérateurs du commerce international "responsables", et en particulier ceux qui détiennent un agrément OEA, il s'agit plutôt d'une bonne nouvelle dans la mesure où l'amélioration de l'efficacité des contrôles devrait augmenter la pression sur les réseaux parallèles qui fleurissent avec la vente en ligne via Internet (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2014).

Le succès d'un contrôle douanier basé sur une détection en amont des risques de fraude, y compris par les expressistes eux-mêmes, se mesurera donc à sa force de dissuasion en impactant logiquement à la baisse le nombre de saisies dans les années à venir...

Pour la douane, il y a aussi une économie d'échelle à la clé : en impliquant chaque expressiste dans un contrôle minimum de ses envois, l'efficacité de ce système collaboratif devrait permettre à l'administration de maîtriser ses besoins en effectifs sur le terrain.

Pour les opérateurs de fret express, cette responsabilisation va potentiellement dans le sens d'une optimisation des procédures administratives qui, associées à un allégement des contrôles douaniers sur la chaîne logistique, leur offrira plus de fluidité opérationnelle et une meilleure maîtrise des délais.

Reste maintenant à savoir ce que désignent concrètement les "dispositifs pratiques de détection des infractions douanières" annoncés par la DGDDI... Génèreront-ils un coût pour les opérateurs ? Rien n'est moins sûr ! Mais la véritable question est de savoir si un retour sur investissement est envisageable, et à quelle échéance.

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Imprimer  B. CHAUVIN / M. ANTIER
Source(s) : www.economie.gouv.fr / www.douane.gouv.fr (avril 2016)
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