Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème COMMERCE INTERNATIONAL
 Pays INDE  Date février 2015

Shining India : l'Inde, star montante de l'économie mondiale ?

Synthèse : Entre méthode Coué, stratégie marketing et pragmatisme politique, le Premier ministre indien, M. Narendra Modi, use de tous les artifices pour faire briller son pays sur la scène internationale et capter l'attention des investisseurs. Certes l'Inde ne manque pas de ressources et d'atouts pour jouer les premiers rôles au casting de l'économie mondiale... mais l'accès au tapis rouge passe par des réformes profondes et risquées !

Le FMI vient d'annoncer qu'en 2016 le taux de croissance du PIB de l'Inde devrait dépasser celui de la Chine... Alors que la question de la légitimité du pays à figurer parmi les BRICS se posait il y à un an à peine (cf. Atmosphère Internationale de février 2014), cette réapparition officielle sous les feux de la rampe internationale fait évidemment les affaires du volontariste Premier ministre indien !

Il n'aura en effet fallu que neuf mois à M. Modi, metteur en scène du "Shining India", pour créer une dynamique nationale autour d'un programme de "flexisécurité" pourtant très contesté, et un regain d'intérêt des partenaires internationaux grâce à une stratégie marketing digne des grandes superproductions (cf. Atmosphère Internationale d'octobre 2014). Une campagne de promotion réussie, tant auprès des industriels indiens que des leaders politiques et milieux d'affaires internationaux.

De grands acteurs industriels tels Mahindra, Bajaj, ou le groupe Reliance, ont déclaré soutenir le plan gouvernemental. Micromax, leader indien des terminaux mobiles a annoncé la relocalisation d'une partie de sa production, attirant dans son sillage ses concurrents chinois Huawei et Xiaomi qui viennent d'investir à Bangalore.

Les dirigeants américains, chinois et japonais se sont succédés à Delhi pour renforcer les liens de partenariat économique et financier. La France aura une carte à jouer en avril à l'occasion de la venue de M. Modi, notamment sur les dossiers du nucléaire civil et de l'aviation militaire...

Avis de l'expert : Le marketing est efficace, le contexte économique porteur et le tissu industriel mobilisé… mais il reste à convaincre les investisseurs internationaux de l'amélioration du climat des affaires : le niveau élevé de corruption, la lourdeur et l'opacité de l'administration et la complexité fiscale constituent encore aujourd'hui des freins puissants au déploiement de stratégies d'implantation industrielle et de conquête commerciale.

On se souviendra par exemple que l'ouverture du marché indien au commerce de détail, annoncée en grande pompe par le précédent gouvernement, avait fortement aiguisé les appétits des grandes marques de distribution (cf. Atmosphère Internationale d'août 2011)... avant de se solder par un échec : une douche froide qui a contribué à détourner de nombreux investisseurs de l'Inde, dénonçant le manque de maturité du marché et de fiabilité des institutions.

La volonté politique seule, même emballée dans du papier brillant, ne saurait suffire à lever ces incertitudes. D'autant que les principaux points faibles de l'Inde aux yeux des investisseurs étrangers constituent les piliers d'un modèle socio-économique établi de longue date : les supprimer rapidement pourrait engendrer une déstabilisation du système ayant des conséquences graves, quoique temporaires, en termes de précarisation et d'appauvrissement d'une part significative de la population qui vit ou survit grâce au système actuel.

Certes, les évolutions récentes de la législation indienne en matière de RSE pour les entreprises constitueront un matelas amortisseur pour les réformes structurelles à venir (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2014), mais d'une part elles ne couvriront pas l'ensemble du tissu économique indien (en particulier les petites entreprises et les activités non déclarées) et d'autre part leur mise en œuvre prendra au minimum plusieurs années...

Le risque d'explosion sociale est donc bien réel, et M. Modi devra jouer serré pour entretenir l'engouement qu'il suscite grâce à sa forte présence à l'international, tout en mettant en place les réformes profondes nécessaires pour attirer et capter les capitaux étrangers de manière pérenne.

En attendant de jouer sur le devant de la scène internationale, le principal atout de l'Inde réside actuellement dans le fait que ses coûts de main d'œuvre sont de plus en plus attractifs par rapport à la Chine : le pays devra donc probablement endosser encore quelques temps le rôle moins flatteur de pays de sourcing à bas coût, ne serait-ce que le temps de constituer un bas de laine suffisant pour s'assurer la paix sociale durant sa mutation à venir...

ACTE International est présent depuis 20 ans en Inde à travers son important réseau d'agents (transport international) et ses équipes d'auditeurs (audit social, audit anti-corruption, audit sécurité bâtiments,…) : n'hésitez pas à nous contacter pour tout renseignement ou demande d'assistance pour vos projets de développement sur l'ensemble du sous-continent indien.
Imprimer  A. LE ROLLAND / M. ANTIER
Source(s) : L'Usine Nouvelle (février 2015)
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