| Synthèse : Dans le cadre de leurs missions opérationnelles, nos experts en ingénierie douanière et fiscale sont régulièrement confrontés à des classements tarifaires extrêmement techniques : à travers le cas concret des montres connectées, nous rappelons aux opérateurs du commerce international qu'une bonne classification douanière des produits est essentielle pour optimiser et sécuriser leur supply chain...
Qu'est-ce qu'une montre connectée ?
La montre connectée, aussi appelée "montre intelligente" ou "smartwatch", est une montre bracelet électronique qui intègre des fonctionnalités de communication élaborées : réception-émission d'appels téléphoniques, notifications provenant d'un téléphone mobile, envoi et réception de messages, reconnaissance vocale, podomètre, cardiofréquencemètre, GPS,…
Comment classer une montre connectée ?
Rappel préalable de deux règles fondamentales du tarif douanier commun : - Le classement sous une nomenclature douanière dépend des caractéristiques réelles de la marchandise, sans tenir compte de sa désignation commerciale.
Dans le cas présent, le terme "montre connectée" est une dénomination commerciale et non douanière : on ne peut donc pas se fier à cette expression pour associer le produit à un libellé du tarif douanier. - Les produits "mélangés", composés de matières différentes ou constitués par l'assemblage d'articles différents (différentes technologies embarquées), dont le classement ne peut être effectué en application de la règle principale (3.a), sont classés d'après la matière ou l'article qui leur confère leur caractère essentiel lorsqu'il est possible d'opérer cette détermination.
Les diverses technologies intégrées à une "montre connectée" lui conférant de multiples fonctionnalités (en plus d'indiquer l'heure), nous pouvons lui attribuer le statut de produit "mélangé". En vertu de ces deux principes, nous pouvons exclure de classer ce produit sous les positions tarifaires 9101 et 9102 "Montres-bracelets, montres de poche et montres similaires (y compris les compteurs de temps des mêmes types)". Idem pour toutes les positions du chapitre 91, consacré aux produits et éléments d'horlogerie... Nous voilà revenus au point de départ !
Pour effectuer correctement le classement douanier de ce produit, il va donc falloir étudier ses caractéristiques techniques afin d'identifier l'ensemble de ses fonctionnalités pour en déterminer la principale...
Dans les cas les plus fréquents, les codes SH (Système Harmonisé) à considérer sont les suivants : Fonction téléphonie et/ou télécommunication
Si la montre connectée permet d'émettre et de recevoir des appels considérant ainsi qu'il s'agit de sa fonction principale, on devra se référer au sous-chapitre 8517 "Postes téléphoniques d'usagers, y compris les téléphones pour réseaux cellulaires et pour autres réseaux sans fil".
Concernant les sous-positions SH8, deux approches sont possibles : - Dans le cas où la montre connectée permet de communiquer directement via le réseau GSM comme les téléphones cellulaires (carte SIM intégrée) : sous-position 85171200 "Téléphones pour réseaux cellulaires et pour autres réseaux sans fil - Autres"
- Si la montre nécessite une connexion (Bluetooth ou Wifi) à un autre appareil (smartphone) pour communiquer on considèrera plutôt la sous-position 85176200 "Appareils pour la réception, la conversion et l'émission, la transmission ou la régénération de la voix, d'images ou d'autres données, y compris les appareils de commutation et de routage".
Fonction GPS Si la principale fonction de la montre est d'enregistrer un parcours en utilisant le système de positionnement par satellite, la sous-position 85269120 "Récepteurs de radionavigation" apparaît la mieux indiquée. Fonction cardiofréquencemètre Les montres "intelligentes" capables de capter et d'enregistrer la fréquence cardiaque de ceux qui les portent, s'il s'agit de leur fonction principale, pourraient être classées en sous-position 90292038 "Indicateurs de vitesse et tachymètres - Autres - Autres", bien que la sous-position 90318080 "Instruments, appareils et machines de mesure ou de contrôle, non dénommés ni compris ailleurs dans le présent chapitre; projecteurs de profils" semble privilégiée... Fonction podomètre La montre qui compte le nombre de pas n'a pas attendu d'être connectée pour exister ! A l'origine elle était munie d'un système de balancier capable d'incrémenter mécaniquement un compteur... D'ailleurs la sous-position 90291000 "Compteurs de tours ou de production, taximètres, totalisateurs de chemin parcouru, podomètres et compteurs similaires" mentionne clairement ce terme. ATTENTION : aujourd'hui ce système "mécanique" a été largement supplanté par la version électronique qui utilise en général un programme de calcul basé sur la distance parcourue obtenue grâce à la fonction... GPS ! |
Avis de l'expert : A l'instar du drone civil (cf. Atmosphère Internationale de mai 2017) qui intègre de nombreuses fonctionnalités et technologies embarquées, la montre connectée ou "smartwatch" est difficile à classer selon la nomenclature douanière communautaire actuelle.
Or si l'on peut estimer que la fonction "téléphonie", du moment qu'elle est implantée nativement dans l'appareil, domine les autres fonctionnalités précitées, il est impossible d'établir une hiérarchie fonctionnelle...
A titre d'exemple, l'administration des douanes française a délivré un RTC (Renseignement Tarifaire Contraignant) en mai 2017 classant une montre GPS et cardiofréquencemètre au sous-chapitre 9031 (voir ci-dessus).
Il est à noter que des différences d'interprétation notables peuvent également exister d'une administration douanière communautaire à une autre : la douane autrichienne a ainsi classé une montre dotée de nombreuses fonctionnalités (podomètre, calorimètre,...) au sous-chapitre 9102 "Montres-bracelets, montres de poche et montres similaires [...]" n'étant pas en mesure d'identifier la fonctionnalité essentielle du produit...
Rappelons, une fois de plus, que le classement douanier conditionne le calcul des droits et taxes ainsi que la réglementation applicable au produit : bien à double usage, droits anti-dumping et antisubventions, restrictions commerciales,...
Une position tarifaire erronée (fausse déclaration d'espèce) peut avoir de graves répercussions tant à l'importation (droits de douane éludés entraînant une pénalité douanière) qu'à l'exportation (contournement des mesures de protection commerciale).
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