Atmosphère Internationale
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 Thème COMMERCE INTERNATIONAL
 Pays UE / CHINE / MONDE  Date décembre 2014

Contrefaçon import UE : la Chine 1er exportateur mondial de contrefaçon

Synthèse : En 2013, près de 80% des articles contrefaits saisis par les douanes à l'importation dans l'UE étaient d'origine Chine ou Hong Kong. Ce chiffre est encore plus impressionnant si on le compare aux 12% enregistrés en... 2000 ! Un constat d'autant plus inquiétant que les moyens d'action sont limités pour les entreprises victimes du trafic, et que les autorités chinoises ne semblent pas motivées pour endiguer ce véritable fléau du commerce mondial...

Les statistiques 2013 de la douane communautaire* démontrent clairement le leadership de la Chine et de Hong Kong concernant le trafic de produits contrefaits ou portant atteinte aux droits de protection intellectuelle (DPI) à destination de l'Union européenne :

Répartition globale des saisies d'articles contrefaits par pays de provenance en 2013 (top 5)

Chine
 
66.12 %
Hong Kong
 
13.31 %
Grèce
 
5.83 %
Turquie
 
3.68 %
Emirats Arabes Unis
 
2.49 %

Quelle que soit la catégorie de produits concernée, dans la très grande majorité des cas la Chine est la principale provenance. L'origine Hong Kong, en part plus modeste, est tout de même au premier rang pour certains articles : afficher le tableau de synthèse par catégorie d'articles.


* Rapport 2013 de la Commission européenne sur la lutte contre la contrefaçon aux frontières à disposition de nos abonnés sur simple demande.
Avis de l'expert : La Chine, Hong Kong inclus, est sans conteste le premier pays exportateur d'articles contrefaits au monde.

Outre les marchés communautaire et américain, la Chine fournit également les pays d'Asie du sud-est où la commercialisation est assurée par la diaspora chinoise (à l'instar d'ailleurs de ce qui se passe généralement en Europe et aux USA). C'est le cas en Indonésie, Philippines et Malaisie et même au Vietnam où, en dépit d'une zone frontalière terrestre militarisée, des saisies sont régulièrement réalisées par les douanes vietnamiennes.

Il existe également un marché intérieur pour les produits contrefaits sur le territoire chinois réparti entre population locale (souvent copies de mauvaise qualité) et touristes étrangers (comme par exemple le Silk Market à Pékin).

La Chine se distingue aussi dans la contrefaçon des créations artistiques (musique, films sur support dvd/cd ou téléchargement) et les copies de logiciels : dans son dernier rapport annuel l'USTR (Office of the United States Trade Representative) s'inquiétait d'ailleurs du peu de progrès réalisé par le gouvernement chinois pour éradiquer l'utilisation de copies de logiciels dans sa propre administration tant au niveau central que provincial.

De quels moyens d'action dispose le détenteur de droits lorsqu'il est victime de contrefaçon en Chine ?

La procédure pénale, bien qu'elle soit la plus efficace, est malheureusement la plus difficile à déclencher car soumise à un système de seuil : le chiffre d'affaire du contrefacteur doit dépasser 50 000 yuan (environ 5 000 €) ou bien ses gains doivent être supérieurs à 30 000 yuans (3000 €), minima ramenés à 30 000 et 20 000 yuans si plus de deux marques sont contrefaites.
L'interprétation restrictive de la règle par les services de la police économique empêche de fait toute action pénale contre les sites Internet installés en Chine.

A noter que lorsque le seuil pénal est atteint et même largement dépassé, la police économique peut tout de même décider de ne pas se saisir d'un dossier...

La plupart des actions menées sont donc des procédures administratives, confiées à l'Administration du Commerce et de l'Industrie (AIC), organisme compétent et efficace mais qui ne peut que confisquer les articles et infliger des amendes. Il n'y a dans ce cas ni perquisition, ni saisie, ni surtout d'enquête qui permettrait d'évaluer le trafic et ses ramifications et d'en identifier les responsables.
Il n'est donc pas étonnant que le phénomène perdure et s'amplifie dans une certaine impunité !

Un mot sur Hong Kong où, en dépit d'une législation sur la propriété intellectuelle plutôt bien adaptée (héritée du système britannique) et d'un unique service de répression (la douane) compétent et bien organisé, la situation en matière de contrefaçon est préoccupante : le port de Hong Kong assure une partie non négligeable des exportations d'articles contrefaits acheminés en contrebande depuis la province limitrophe du Guangdong (Canton) en Chine continentale. L'implication dans le trafic de certaines compagnies d'import-export hongkongaises paraît évidente. D'autre part, l'existence d'une production locale n'est pas à exclure, notamment dans le domaine des pièces horlogères.

A noter que les notions douanières de "quantité raisonnable" (côté Chine continentale) et "non-commercial purpose" (côté Hong Kong) empêche toute action dissuasive contre le trafic de type "fourmi" à la ville frontière de Luohu où prolifèrent les boutiques d'articles contrefaits.

En conclusion, si des avancées indéniables ont été réalisées ces dernières années en Chine dans le domaine de la protection de la propriété intellectuelle cela n'a pas ralenti la progression de l'industrie de la contrefaçon...

Il y a de la part des autorités chinoises à la fois un manque de volonté politique et un protectionnisme teinté de nationalisme (qui se manifeste notamment dans les litiges ayant trait aux brevets). Cette attitude entraine un déni de la réalité et une certaine complaisance pour les contrefacteurs.

On constate également un rejet des responsabilités quant à l'origine de la contrefaçon : certains hauts fonctionnaires chinois n'hésitant pas à accuser les acheteurs occidentaux d'être à l'origine, en tant que demandeurs et clients, de l'épanouissement du trafic...

Sujets parus précédemment sur cette thématique :
Contrefaçon import UE : explosion du trafic par internet en 2013 !
Contrefaçon import UE : bilan 2013 des douanes communautaires

L'équipe éditoriale d'ACTE International remercie M. Frebourg (Frebourg International Consultant Ltd) pour son analyse éclairée sur ce sujet. Expert en protection de la propriété industrielle, cette société est spécialisée dans l'élaboration, le déploiement et la sécurisation de votre stratégie de protection des DPI à l'international, particulièrement en Asie.
Imprimer  M. ANTIER / M. FREBOURG
Source(s) : Commission européenne / Frebourg International Consultant Ltd (juillet 2014)
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