Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème RSEE INTERNATIONALE
 Pays ETHIOPIE  Date mars 2016

Risque éthique : l'Ethiopie, une bombe à retardement ?

Synthèse : Un récent article sur les conditions de travail dans les secteurs du textile-habillement et de la chaussure en Ethiopie, laisse présager d'une forte augmentation du risque RSE dans les usines de confection du pays. Un an à peine après les premières alertes médiatiques, le développement à marche forcée des industries manufacturières dopées par les investissements chinois s'est ostensiblement réalisé au détriment des considérations sociales et environnementales... Devoir de vigilance plus que jamais de rigueur !

Le reportage publié en février dernier dans la rubrique Afrique du Monde.fr confirme les craintes que nous émettions il y a moins d'un an à propos du risque éthique pour les donneurs d'ordre en Ethiopie (cf. Atmosphère Internationale d'avril 2015).

D'un côté, un gouvernement dirigiste qui veut aller vite pour transformer une économie agricole à plus de 80% en poumon industriel de l'Afrique, et offre des conditions plus qu'attractives aux investisseurs privés, majoritairement étrangers : exonérations fiscales, exemptions de droits de douane pour les matières premières et machines importées, parcs industriels clés en main avec approvisionnement indépendant en électricité et moyens de transport, main d'œuvre jeune et très bon marché à faible taux de syndicalisation…

De l'autre, des industriels chinois et taïwanais du secteur textile et de la chaussure qui n'ont pas hésité à délocaliser des dizaines de milliers d'emplois et à investir massivement en Ethiopie, en apportant leur savoir-faire et leur mentalité industrielle, afin d'échapper à l'augmentation exponentielle des salaires et du coût des matières premières dans leur propre pays (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2014).

Et entre les deux, des ouvriers qui se plaignent de leurs conditions de travail : salaire moyen entre 60 et 70€/mois pour des cadences de travail excédant 48h/semaine, management par la peur et le harcèlement, manque d'équipements de protection, non-respect des droits syndicaux… Sans oublier les premiers signes de dégâts environnementaux et sanitaires dans les zones proches des sites industriels.

La rédactrice de l'article du Monde n'hésite pas à faire un parallèle avec la situation au Bangladesh de l'avant Rana Plaza : provocation médiatique, ou déclenchement d'alarme salutaire ?
Avis de l'expert : On est ici loin de l'image positive véhiculée par les médias il y a 5 ou 6 ans, annonçant la renaissance de l'Ethiopie en tant que nouvel Eldorado pour les entreprises internationales à la recherche de solutions alternatives au sourcing chinois.

Au-delà des freins structurels qui subsistent malgré son formidable bon en avant (cf. Atmosphère Internationale de novembre 2014), le contexte politique actuel de l'Ethiopie favorise en grande partie à lui seul une exposition majeure aux risques éthiques, sociaux et environnementaux pour les entreprises qui s'y installent ou s'y approvisionnent.

A ce jour, aucun indicateur de bonne volonté du gouvernement éthiopien pour établir une stratégie de gouvernance équitable et durable n'est visible : la question emblématique du salaire minimum légal dans le secteur privé n'est d'ailleurs absolument pas à l'ordre du jour des dirigeants qui n'ont aucune intention déclarée de ratifier la convention C131 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT)...

Le seul levier d'amélioration des conditions de travail semble donc être le rapport de force : les premières grèves auraient commencé à faire bouger les lignes dans certaines usines.
L'OIT qui soutient pour sa part certaines initiatives de donneurs d'ordre internationaux en faveur de l’amélioration des relations au travail, espère obtenir un renforcement du droit syndical, susceptible de favoriser les négociations internes. Un travail de longue haleine qu'il sera tout de même bien difficile de mener à terme sans appui gouvernemental.

En résumé : instabilité politique et sociale, emprise étatique, non- respect des droits humains au travail et des droits des populations autochtones, dégâts environnementaux et crises sanitaires, corruption institutionnalisée… Nous avons là tous les ingrédients d'une bombe à retardement !

Les entreprises responsables souhaitant investir en Ethiopie doivent être conscientes de ces risques particuliers et devront adapter leur plan de vigilance et leur niveau de diligence raisonnable, pour sécuriser leur supply chain internationale : l'expérience acquise dans les pays de sourcing plus "traditionnels" comme le Bangladesh, leur sera utile pour développer un modèle socio-économique plus juste et plus durable en Ethiopie... et se sortir du "piège éthique" qui semble sur le point de s'y refermer.

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Source(s) : www.lemonde.fr (février 2016)
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