Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème RSEE INTERNATIONALE
 Pays FRANCE / MONDE  Date avril 2015

Lois anti-corruption et justice transactionnelle : des exemples à suivre !

Synthèse : Depuis 2010, la justice américaine a sanctionné plusieurs grands groupes français pour des actes de corruption d'agents publics étrangers. Cependant aucune de ces entreprises n'a été jugée ou reconnue coupable aux Etats-Unis : elles ont toutes eu recours à la justice transactionnelle, encadrée outre-Atlantique par le Deferred Prosecution Agreement (DPA)... Un exemple à suivre en France ?

C'est en tout cas l'avis de l'ONG Transparency International France, qui dénonce le laxisme du système judiciaire français dans le traitement des affaires de corruption transnationale et plaide pour une justice moins rigide et plus investie dans la prévention (cf. Atmosphère Internationale d'avril 2015).

Mais en quoi consiste concrètement la "justice transactionnelle", et sous quelle forme pourrait-elle être adaptée au système judiciaire français ?

Aux Etats-Unis, le Deferred Prosecution Agreement (DPA) est un accord passé avec l'administration par lequel une société faisant l'objet d'une enquête pour délinquance économique accepte de s'acquitter de sanctions financières, de reconnaitre des éléments de fait et de se soumettre à des mesures destinées à prévenir la commission d'infractions futures, en contrepartie de l'extinction des poursuites à son encontre (au bout de 1 à 4 ans).

En France, il n'existe pas de procédures alternatives aux poursuites applicables aux infractions de corruption : seule la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC - depuis 2011 pour des faits de corruption) permet d'accélérer le traitement des affaires pénales.

Contrairement au DPA (reconnaissance de faits), la CRPC (reconnaissance de culpabilité) se solde obligatoirement par une condamnation pénale, similaire à un jugement du tribunal (inscription au casier judiciaire, exclusion des marchés publics, etc.). Or à ce jour, aucune entreprise française n'a eu recours à la CRPC pour des infractions de corruption... La raison en est simple : privilégier un procès au long cours avec une très faible possibilité de condamnation apparaît comme une bien meilleure option !

Aujourd'hui, nombreuses sont les entreprises françaises à réclamer une justice transactionnelle dans notre pays. Mais transposer en l'état le modèle américain ne semble pas envisageable : le système du DPA, déjà jugé inconstitutionnel par le législateur britannique, devrait également l'être en France (insécurité juridique, droits de la défense etc.).
En revanche le modèle britannique, très largement inspiré du DPA américain, propose une procédure compatible avec le droit français* : procédure strictement encadrée par la loi, rôle central du juge, indemnisation des victimes, etc.

Pour l'heure, Transparency International France s'inquiète du manque de volonté de l'Etat français pour élaborer une stratégie en ce sens...

* Tableau comparatif des procédures alternatives de poursuite à disposition de nos abonnés sur simple demande.
Avis de l'expert : Une justice transactionnelle à l'image d'un DPA britannique serait une avancée importante pour la justice française et ses acteurs, et participerait indéniablement à une amélioration du climat des affaires à l'international.

La charge de travail pour l'action publique serait allégée, avec des délais d'investigation et de jugement raccourcis, des frais de justice réduits, des enquêtes menées à terme et sans pressions extérieures, et une source de revenus appréciable pour l'Etat français.

L'entreprise verrait sa santé financière préservée en s'acquittant d'une amende proportionnée et conserverait notamment l'accès aux aides et marchés publics. De plus l'obligation de mise en conformité devrait lui permettre d'éviter d'être à nouveau confrontée aux tribunaux.
Un cercle vertueux pour une organisation qui identifie ses failles et s'inscrit dans une dynamique de progrès : une situation bien moins dévalorisante en termes d'image vis-à-vis des partenaires et clients !

Enfin, l'opinion publique verrait d'un bon œil la sévérité des sanctions sans pour autant qu'elles mettent en danger les emplois. La publication officielle des décisions de justice transactionnelle pourrait ainsi améliorer les rapports de confiance entre citoyens, entreprises et justice.

Toutefois, des questions restent en suspens comme l'attribution du monitoring (public ou privé), le cumul des poursuites (double condamnation), la poursuite à part en entière des personnes physiques ou encore la prise en compte du niveau de responsabilité des entreprises dans l'infraction de corruption.
Enfin, il apparaît nécessaire d'envisager une harmonisation supranationale des différents systèmes de justice transactionnelle, actuels et futurs, afin d'adresser un message clair aux entreprises du monde entier : l'OCDE est tout naturellement pressentie pour cette tâche.

Nous aborderons ce sujet lors de la conférence que nous organisons avec Transparency International France et le Global Compact France (PACTE MODIAL ONU) le 04/06/2015 à Paris sur le thème : Le risque de corruption à l'export : identifiez les maillons faibles de votre supply chain.

ACTE International, est un organisme agréé par Ethic Intelligence pour auditer et valider le système de gestion de la prévention anti-corruption des entreprises : diagnostic, audit d'évaluation des risques de corruption ou audit de validation de votre système de prévention, nous avons la solution adaptée à vos besoins ! Pour plus d'informations, consultez notre site Web.
ETHIC Intelligence propose une formation "Politiques Cadeaux, Invitations, Sponsoring et Mécénat" jeudi 21 mai 2015 à Paris.
Imprimer  M. FOURCADE
Source(s) : Transparency International France (mars 2015)
Tous droits réservés © ACTE International (2015)  |  Exonération de responsabilité