Synthèse : En décembre dernier, les membres de l'OMC avaient conclu une série d'accords préliminaires relatifs à la facilitation et à l'harmonisation des échanges internationaux. Ce faible espoir de relance des négociations du cycle de Doha vient d'être brisé net par l'Inde qui a refusé de signer les accords définitifs dans les délais... L'institution internationale survivra-t-elle à ce nouveau séisme ? Les accords issus de la 9ème conférence ministérielle de l'OMC en décembre 2013 avaient fait souffler un vent d'optimisme au sein des instances de l'organisation mondiale, ainsi que dans les principaux milieux d'affaire internationaux (cf. Atmosphère Internationale de décembre 2013). Le "paquet de Bali" qui devait être définitivement adopté au plus tard le 31 juillet 2014 par tous les pays membres, pouvait remettre sur les rails l'avancée des négociations multilatérales en vue d'établir un cadre réglementaire global pour le commerce international, tel que prévu à Doha en 2001. Or, un pays a refusé au dernier moment de ratifier l'accord, réduisant à néant le travail de négociations organisé par le Directeur général depuis des mois : à la surprise générale, c'est l'Inde qui a appuyé sur le détonateur, se justifiant par le fait que ses revendications de gestion autonome en matière de sécurité alimentaire n'avaient pas obtenu satisfaction... | Avis de l'expert : Il y a huit mois, l'OMC semblait enfin pouvoir espérer sortir de l'ornière profonde où elle s'était enlisée, année après année, suite aux échecs répétés des négociations du cycle de Doha... Une lueur d'espoir pour les défenseurs du multilatéralisme, ranimée pour beaucoup grâce à l'ineffable optimisme de son nouveau directeur général, le Brésilien M. Azevedo. Et à dire vrai, les motifs de satisfaction quoique peu nombreux étaient cependant bien réels : les 159 membres de l'OMC avaient signés conjointement une série d'accords préliminaires qui ouvraient potentiellement une nouvelle séquence dans les négociations globales... après 12 ans d'impasse ! Bien entendu, nous avions souligné à l'époque que la relance du processus allait être longue et périlleuse, et même évoqué le risque qu'un seul pays membre puisse faire capoter l'ensemble du processus par son droit de veto... C'est malheureusement ce qui vient de se passer ! L'Inde, en refusant au dernier moment d'apposer sa signature au bas des accords de Bali a surpris tous ses partenaires et mécontenté la plupart. Les Etats-Unis, l'Union européenne et l'Australie ont vivement dénoncé ce que le politiquement correct interdit d'appeler un "acte de sabotage" : une décision politique qui risque en tout cas d'être lourde de conséquences sur la scène internationale pour le tout récent Premier ministre indien (cf. Atmosphère Internationale de juin 2014). Quoiqu'il en soit, l'Organisation Mondiale du Commerce est quasiment retombée un cran plus bas qu'avant Bali... Autant dire que le poids sur les épaules de son Directeur général est immense, et que la tâche qui l'attend lui demandera sans doute encore plus d'énergie et d'optimisme... Mais lui en reste-t-il assez ? Assez pour reprendre son bâton de pèlerin et parcourir la planète en août en enchaînant tours de table et tractations officieuses afin d'espérer présenter un plan de sauvetage en septembre ? Assez pour empêcher les pourfendeurs du multilatéralisme de prendre le dessus et d'imposer une réforme structurelle de l'OMC impliquant notamment la réduction des pouvoirs décisionnels de certains pays au profit d'un "G8" ou d'un "G12" tout puissant ? Assez pour continuer à défendre bec et ongles les petits pays, les économies fragiles et dépendantes, les futurs émergents qui se demandent désormais à quelle sauce ils vont être mangés ? Si tel n'est pas le cas, le risque est grand de voir l'Organisation Mondiale du Commerce, telle que nous l'avons connue ces 25 dernières années, tout simplement disparaître. Une possibilité que nous évoquons depuis plus de 10 ans, à travers notre travail de veille et d'alerte, en constatant la multiplication des accords commerciaux bilatéraux (cf. Atmosphère Internationale de juin 2014) qui affaiblissent chaque jour un peu plus les prérogatives de l'OMC et contribuent à créer un environnement complexe et fragile pour les véritables acteurs du commerce international : les entreprises ! Rendez-vous est pris en septembre pour un état des lieux de rentrée... | | | |