RSE : le Conseil européen avance sur la directive relative au devoir de vigilance

ACTualité

December 2022

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Après plusieurs négociations, le Conseil européen s'est arrêté sur un texte excluant le secteur financier du champ d’application des exigences du devoir de vigilance.

Proposée le 23 février par la Commission européenne (cf. RSE : la Commission européenne adopte la proposition de directive sur le devoir de vigilance), la directive CSDD (Corporate Sustainability Due Diligence) sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité a franchi un nouveau pas. Jeudi 1er décembre, le Conseil européen a en effet adopté une position commune sur le texte après plusieurs compromis discutés entre États-membres.

Initialement, la proposition vise à rendre les grandes entreprises européennes et certaines entreprises étrangères ayant une activité commerciale dans l'UE, responsables des actions de toute leur chaîne d'approvisionnement. Charge à elles de veiller à la fiabilité de leurs sous-traitants au regard du respect de l'environnement et des droits humains. La Commission européenne avait proposé qu'elle s'applique à toutes les entreprises basées ou opérant dans l'Union européenne qui emploient plus de 500 personnes et réalisent un chiffre d'affaires annuel net de 150 millions d'euros. Seraient également concernées les plus petites entreprises des secteurs à haut risque comme le textile, l'agriculture ou encore l'extraction minière.

Le Conseil européen, sous la pression de la France, l’Espagne ou encore l’Italie, a penché pour des dispositions moins étendues en termes de responsabilités pour les dommages survenant le long de la chaîne de valeur des entreprises. Le terme « chaîne de valeur » a été écarté au profit du terme « chaîne d’activités », plus restrictif car il englobe principalement la chaîne d’approvisionnement des entreprises et seulement une portion très restreinte de la partie en aval de la chaîne de valeur. Le Conseil souhaiterait également que seules soient impactées les entreprises employant plus de 1 000 salariés et réalisant plus de 300 millions d’euros de chiffre d’affaires. Par ailleurs, au grand mécontentement de certains États -membres et ONG, le gouvernement français, supporté par l'Italie, l'Espagne et la Slovaquie, a réussi à obtenir l’exclusion du secteur financier de la directive, en rendant facultative l’inclusion des services financiers dans le champ d’application de la directive pour les États-membres. Les banques pourraient ainsi ne pas être tenues responsables des violations des droits de l’homme surgissant dans le cadre d’activités commerciales financées par leurs prêts.

Prochaine étape : le texte, qui est encore en cours de discussion au sein du Parlement, devrait être débattu dans les prochains mois entre le Conseil et le Parlement avant d'aboutir à sa version finale. La date d’entrée en vigueur n’est donc pas encore actée.

Avis d'expert

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Sylvie THONNERIEUX, Experte - formatrice en Responsabilité Sociétale Internationale chez ACTE International

Les débats entre le Conseil et le Parlement, les deux co-législateurs de l'Union européenne, promettent d'être houleux, tant les positions initiales sont éloignées ! N'oublions pas que c'est le Parlement européen qui, avec sa Résolution du 10 mars 2021, avait émis officiellement des recommandations ambitieuses à l'attention de la Commission sur le devoir de vigilance et la responsabilité des entreprises*. Résolution qui avait poussé la Commission à travailler sur le sujet et abouti à sa proposition de Directive en février de cette année. Le texte présenté par la Commission étant déjà moins disant par rapport aux demandes du Parlement, il est évident que les parlementaires vont se battre bec et ongles contre les propositions du Conseil, axées sur une responsabilité moins large pour les entreprises, au détriment d'une plus grande protection des droits de l'homme et de l'environnement.

Tout devrait se passer au sein du trilogue européen qui devrait débuter au plus tôt au deuxième trimestre 2023, après que le Parlement ait finalisé sa première lecture du texte et ses propositions d'amendement. Les trilogues sont des réunions informelles entre les institutions européennes où Parlement européen et Conseil des ministres discutent d'un projet de loi. La Commission européenne se joint aux négociations avec pour objectif d’aboutir à un compromis et au texte législatif final.

 

* cf. Devoir de vigilance : le Parlement européen propose un texte ambitieux

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Source(s) : Les Echos | Euractiv

Rédacteur(s) : C. BEDOUIN | S.THONNERIEUX