Tunisie : Bruxelles réagit face aux mesures restrictives à l'importation

ACTualité

octobre 2022

Mots-clés

La mise en application des mesures de contrôle à l’importation annoncées le 8 octobre par les Ministères tunisiens heurte autant les entreprises que la Commission européenne.

Pendant que les opérateurs économiques et les transporteurs tentent de mettre en place les procédures pour répondre aux nouvelles mesures restrictives à l’importation des biens de consommation instaurées le 17 octobre par la Tunisie (cf. Tunisie : nouvelles mesures pour l'importation des biens de consommation), la Commission européenne a immédiatement fait part de son inquiétude. Dans une lettre adressée le 18 octobre à la Ministre du Commerce et du Développement des Exportations tunisienne*, l'institution européenne a soulevé les points marquants de ces nouvelles dispositions :

  • chaque opération d'importation devra être autorisée au préalable : ceci correspond à une licence non-automatique à l'importation et est contradictoire aux engagements bilatéraux existant entre la Tunisie et l'UE,
  • l'obligation d'importer directement de l'usine sans passer par l'intermédiaire des distributeurs et de soumettre les factures d'usine pour obtenir l'autorisation d'importation remet fondamentalement en question les relations commerciales et contractuelles entre partenaires économiques et est rédhibitoire,
  • la lourdeur administrative entraînée par l'obligation de présenter huit documents avant l'importation est considérable.

Les Ministères du Commerce, de l'Industrie et de la Santé tunisiens ont respectivement transmis leurs listes de biens dits de consommation aux entreprises*. Y sont répertoriés des produits de toutes catégories : pièces de motos, fournitures électriques (interrupteurs, lampes...), jouets, électroménager, peinture, produits alimentaires, prêt- à-porter, etc. Pour Bruxelles, cette dernière mesure ne semble pas basée sur une analyse des risques et vient s'ajouter à un mécanisme existant de contrôle technique complexe et peu transparent au moment des mises sur le marché des produits importés par les entreprises tunisiennes.

Dans son courrier, la Commission européenne requiert, avec autant de tact que de fermeté, une réunion de crise et regrette que « laTunisieàcestaden’aitnotifiéàlOMC nilatransparencede ses mesures douanières ni les points de contact pour la coopération douanière dans le cadre de l’Accord pour la Facilitation des Echanges ».

* Lettre de la Commission européenne et listes précises des biens de consommation avec nomenclatures douanières à disposition de nos abonnés sur simple demande par mail.

Avis d'expert

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Didier LE GRAS, Expert - formateur en Ingénierie Douanière et Fiscale chez ACTE International

Après l'Egypte, la Turquie, l'Arabie Saoudite, c'est au tour de la Tunisie de nous imposer, presque sans délai, de nouvelles formalités administratives alors que les grands sujets du moment sont dématérialisation et fluidification des flux internationaux !

Pour l'Union européenne, ces mesures sont perçues comme purement et fortement protectionnistes, sans autre fondement pouvant les justifier.

La Tunisie était déjà dans le viseur de l'UE, car ce pays, ainsi que le Maroc, s'oppose aux simplifications des règles d'origine applicables dans la zone euro- méditerranéenne, ce qui bloque le processus depuis plus d'un an.

Le projet de développement économique à l'intérieur de cette zone est donc, pour le moment, fortement perturbé par l'attitude de l'Egypte, de la Turquie et de la Tunisie, pourtant tous signataires des accords initiaux ayant permis en 2005, de créer le principe de cette zone où peuvent être fabriqués et vendus des produits sans droits de douane, en appliquant le principe du cumul d'origine diagonal**.

** cf. Accord UE / Zone Paneuromed : modernisation de la convention

Source(s) : European Commission

Rédacteur(s) : L. SPRIET | D. LE GRAS