RSE Ouzbékistan : amélioration des conditions de travail dans le coton

ACTualité

février 2021

RSE Ouzbékistan

Les récentes réformes menées par le gouvernement, la pression des ONG internationales, l'amélioration des conditions de travail et l'augmentation des salaires ont permis des progrès majeurs dans l'éradication du recours systématique au travail des enfants et au travail forcé dans la récolte du coton en Ouzbékistan.

Selon un rapport de l'OIT publié en janvier 2021, le recours systématique au travail forcé et au travail des enfants dans la récolte du coton a quasiment disparu, bien que quelques cas isolés persistent. 

Soutenu par un programme de monitoring de l'OIT et de la Banque Mondiale, le pays continue à faire des progrès importants dans ce domaine : en 2020, 96% des travailleurs interrogés dans les champs de coton affirment le faire librement.

Le recrutement forcé des étudiants, enseignants, infirmières et médecins semble avoir complètement disparu. 

L'amélioration des conditions de travail et des salaires, mais aussi l'augmentation du chômage en raison de la crise sanitaire, ont contribué à attirer davantage de travailleurs volontaires dans les champs de coton ouzbeks l'année dernière.

12,9% de la population locale âgée de 18 à 50 ans a été impliquée dans la cueillette : pour près des 2/3 d'entre eux, cette activité reste l'unique source de revenu annuel.

La suppression, en mars 2020, des quotas de production imposés par l'Etat a également joué un rôle important : ce système qui incitait les producteurs de coton à recourir au travail forcé pour atteindre les objectifs, a été remplacé par des contrats commerciaux avec les sociétés privées de la filière textile.

Le rapport identifie cependant de nombreux axes de progrès, également relevés par l'ONG "Uzbek Forum for Human rights" qui a mené sa propre enquête :

Malgré la privatisation du secteur, certaines administrations locales (Hokimiats) continuent à organiser et superviser la récolte, imposant des objectifs à atteindre, intervenant dans les recrutements et dans la formation des travailleurs : les cueilleurs interrogés ont confirmé continuer à faire l'objet de pressions plus ou moins directes de la part de ces décideurs locaux utilisant notamment la menace de perte d'emploi.

Dans certaines provinces, le recours au travail forcé d'employés de banques, militaires et services d'urgence est encore utilisé.

L'ONG a également décelé un nombre plus important d'enfants dans les champs de coton au moment de la fermeture des écoles pendant la crise sanitaire. 

La réforme du secteur du coton est aussi pointée du doigt : centrée sur l'économie de marché, elle engendre des vulnérabilités pour les agriculteurs. Ces derniers ont peu de pouvoir de négociation avec les "clusters" régionaux, véritables monopoles approuvés par le gouvernement qui contrôlent les prix et reprennent les contrats de location des terres sans dédommagement pour les agriculteurs, aboutissant à leur appauvrissement et celui des éco-systèmes ruraux.

Avis d'expert

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Sylvie THONNERIEUX, Experte - formatrice en Responsabilité Sociétale Internationale chez ACTE International

L'amélioration globale de la situation du travail forcé et du travail d'enfants dans le secteur du coton en Ouzbékistan est une illustration probante de ce qu'un engagement multipartite entre gouvernement, organisations internationales, ONG et société civile peut apporter pour le progrès des droits de l'homme au travail.

Poussé par les pressions répétées des différents acteurs internationaux à abandonner son système de travail forcé d'État hérité de l'ère soviétique, confronté au boycott de son coton par les États-Unis et de nombreuses marques du secteur textile sous la pression des consommateurs, boudé par les grands bailleurs de fonds, l'Ouzbékistan s'est engagé depuis 2018 dans un changement drastique de modèle économique.

Outre un renforcement de sa législation, des contrôles répétés et des sanctions plus nombreuses, le gouvernement a créé une Commission nationale sur le travail forcé et la traite des êtres humains qui a fortement contribué aux progrès constatés, en coordonnant les actions entre agences gouvernementales et en impliquant les législateurs, les organes exécutifs, les employeurs, les syndicats et la société civile indépendante.

Tout n'est pas gagné pour autant : ces améliorations restent fragiles, comme le prouve la résurgence du travail d'enfants en période de crise sanitaire.

Les acteurs de ces progrès doivent rester vigilants sur l'équilibre des forces dans le pays : continuer à lutter contre les mauvaises habitudes ancrées dans les administrations et communautés au niveau local, mais aussi veiller à ce que les acteurs du secteur agricole puissent défendre leurs droits, grâce au soutien de syndicats indépendants et d'ONG locales, contre les nouveaux pouvoirs des clusters privés. 

C'est au prix de cette modernisation responsable que l'Ouzbékistan pourra vraiment retrouver la confiance des investisseurs, des donneurs d'ordre et des consommateurs finaux et développer, à terme, un véritable secteur textile local attractif et durable.

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Source(s) : International Labour Organisation | Uzbek Forum for Human Rights

Rédacteur(s) : S.THONNERIEUX  | L.VERBOUW