Risque de corruption : les enjeux de la digitalisation !

ACTualité

November 2020

Corruption et digital

Toutes les formations et les référentiels le disent, la dématérialisation réduit l'exposition au risque de corruption... Mais l'étude produite par le Ministère danois des affaires étrangères nous alerte sur la très grande inégalité générée par la digitalisation dans le monde : entre opportunités générées par la blockchain et risques majeurs d'exploitation des populations exclues du digital, l'étude nous oblige à remettre en cause nos paradigmes en matière de prévention de la corruption.

L'étude* rappelle que ce que nous nommons "petite corruption" au regard des faibles montants, s'avère être extrêmement lourde pour des citoyens déjà en grande précarité.

Pour eux, la récurrence des sollicitations indues constituent un frein d'accès à leurs droits : 13% des revenus des citoyens les plus pauvres du Sierra Leone sont ainsi dépensés en pots-de-vin contre 3,8% des revenus des plus riches !

Remplacer les démarches administratives et documentaires par l'accès en ligne aux informations, formulaires de demandes, dépôt sécurisé de documents, constitue donc un atout majeur dans la lutte contre la corruption.

En l'absence de contact physique, de relation directe avec des agents désignés, les possibilités de chantage et d'extorsion sont extrêmement réduites : le fonctionnaire ou l'agent d'une administration ne peut plus user de son pouvoir pour des sollicitations indues auprès des citoyens ou des entreprises. 

  • Le machine learning et l'intelligence artificielle sont capables de démasquer les scénarios et pratiques complexes de corruption sur des montants colossaux.
  • Les drones et micro satellites permettent de vérifier en temps réel si un immeuble public n'est pas construit selon les plans, l'environnement est saccagé, les règles de pêche non respectées, etc...
  • Les objets connectés, les logiciels, fourniront à l'avenir des données qui contribueront à la lutte contre la corruption.

Encore faut-il que le pays, son gouvernement et son administration soient en capacité de garantir :

  1. La transparence sur l'utilisation des données (moins de 10% des données relevant des marchés publics dans le monde sont disponibles en ligne) 
  2. La performance informatique et digitale 
  3. La simplicité, la fiabilité et la sécurité des systèmes.

Les 193 pays membres de l'ONU ont des portails nationaux avec une automatisation partielle de certaines démarches administratives : 140 fournissent au moins une transaction en ligne (paiement des services et énergie, déclaration de revenus,  création de société,...).

  • L'Estonie est un modèle en la matière avec des services de e-Identity, e-land register, e-healthcare, et le seul pays à avoir mis en place le vote par internet (I-voting)
  • En Afrique, le Kenya, le Rwanda, le Ghana, le Nigéria et la Guinée ont déployé soit l'e-gouvernance, soit l'utilisation de la blockchain, l'open data, ou une plate-forme de lancement d'alerte
  • En Asie, l'Inde et l'Indonésie se différencient avec des solutions de crowdsourcing, e-gouvernance et e-money. 

Encore faut-il que les premières cibles de la corruption aient accès librement à cette technologie et aux connaissances nécessaires pour s'en servir ! La carte de pénétration du téléphone portable parle d'elle même :

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Et dans ce domaine, l'écart homme/femme est très significatif : les femmes travaillant beaucoup dans l'informel, elles accèdent moins que les hommes à l'internet mobile (-26%), au réseau internet (-11% et -32% dans les PVD) et aux téléphones portables (-10%).

Dans un monde qui se digitalise, elles dépendent donc de plus en plus des hommes pour accéder à leurs droits, aux ressources économiques, créer des entreprises, acheter des terres ou des propriétés... Ainsi il existe des risques de "sextorsion", et d'abus de pouvoir de la part des détenteurs d'accès à l'ordinateur, au téléphone portable, à la connaissance des outils informatiques, sans accès possible à la justice.


* "Code to Integrity - Digital avenues to anti-corruption - also for here !" (Ministère des Affaires Etrangères, Danemark) à disposition de nos abonnés : cliquez sur "JE SUIS ABONNÉ" en bas de page.


 

Avis d'expert

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Anne LE ROLLAND, Experte en Prévention de Corruption Internationale (PDG ACTE International Groupe)

Les effets collatéraux de la digitalisation insistent plus que jamais sur l'interdépendance entre lutte contre la corruption et contre la pauvreté.

L'enjeu va bien au-delà du "simple" fait de trouver des dispositifs de prévention de la corruption accessibles et compréhensibles par tous : il convient de s'assurer de la disponibilité du service, du matériel, de la connaissance et de faire tomber les tabous.

Les femmes ont un rôle majeur à jouer dans la lutte contre la corruption autant que dans la bonne gouvernance des États. Les fondations et ONG, autant que les entreprises, doivent engager leur responsabilité sociale dans la digitalisation équitable et pour tous.

La blockchain ouvre des opportunités qui peuvent paraître tout à la fois dérangeantes pour le système économique actuel, et pleines d'espoir pour les générations de demain.

Accéder à la monétisation sans compte bancaire, à des pièces d'identité sans acte de naissance ou d'adresse fixe, au droit de vote à distance, pourrait contribuer à un basculement des forces en faveur d'un monde plus équitable et éthique.

Pour aller plus loin...

1ère PME française prestataire en Global Supply Chain Management certifiée ISO 37001, ACTE International accompagne en France et à l'étranger, les entreprises pour la réalisation de leur cartographie des risques, la création et déploiement de leurs dispositifs de prévention de la corruption : obligation légale (Loi Sapin 2, FCPA ou UKBA), cadre normatif (ISO 37001), exigence commerciale (des clients ou fournisseurs), ou volonté d'excellence des dirigeants,... ACTE International garantit une approche terrain, opérationnelle et calibrée à chaque organisation internationale ! 

Source(s) : https://um.dk/

Rédacteur(s) : A. LE ROLLAND