COVID-19 et Sourcing : le secteur textile-habillement subit la double peine !
Atmosphère Internationale
avril 2020
La crise sanitaire mondiale n’épargne aucun maillon des chaînes internationales d'approvisionnement et de distribution du prêt-à-porter ! Les conséquences sont nombreuses et coûteuses : tour d'horizon...
Thème : |
SOURCING |
Pays : |
France / UE / Chine / Monde |
Le malheur des uns, fait le bonheur des autres ?
La Chine fournit 1/3 du marché mondial de vêtements (Hong Kong compris) et représente 27% de l’approvisionnement des marques françaises.
Début 2020, à la jonction du début de l'épidémie de coronavirus et du Nouvel An chinois, la filière industrielle chinoise du textile-habillement montre des signes de ralentissement.
Dépendance oblige, ce sont d'abord les entreprises de prêt-à-porter (PAP) qui souffrent, impactées par l’impossibilité de s’approvisionner en matières premières.
Suite à la fermeture des usines de confection en raison du risque sanitaire, les importateurs occidentaux ont rapidement tenté de réorienter leurs achats vers d’autres pays tels que l’Inde ou le Bangladesh, parfois sur proposition de leurs propres fournisseurs chinois.
Épargnés temporairement par la première vague de contamination, ces pays ont profité pendant quelques semaines d’une augmentation des commandes... de courte durée, car la propagation rapide du virus au reste du monde a finalement déclenché un confinement général et la fermeture des frontières, stoppant ou freinant les flux import / export dans la plupart des zones de sourcing.
Consommateurs confinés, achats reportés
Les vendeurs de vêtements sont directement impactés : la production attendue début 2020 a subi de nombreux retards de livraison et connu une augmentation notable des taux de fret, mettant en péril les marges.
La fermeture des points de vente et boutiques, associée à une baisse drastique de la demande des consommateurs, a définitivement sonné le glas des premières collections printemps/été.
Pour les sites de vente en ligne encore en activité, se sont les rouages des circuits logistiques de distribution qui se sont grippés : livreurs et transporteurs ont dû, à leur tour, rendre les armes face aux restrictions sanitaires et mesures de confinement généralisées... Entre le 23 et le 25 mars, les ventes en ligne d'articles de mode et équipements de la maison ont reculé de 50% malgré un allègement du délai de rétractation passé de 14 à 30, voire 60 jours !
Face à la crise, les marques prennent des dispositions similaires
- Fermeture progressive des sites de production / fabrication en France et en Europe : ateliers de Haute Couture, de prêt-à-porter, d'artisanat ou de joaillerie ;
- Annulations de commandes ;
- Maintien des ventes en ligne avec une progression notoire enregistrée dans les premières semaines du confinement ;
- Transfert des activités vers la production de gel hydroalcoolique ou de masques pour les hôpitaux français.
Avis d'expert
Anne LE ROLLAND, Experte en Global Supply Cahin Management (PDG ACTE International Groupe)
Du côté de l'offre, ce sont les importateurs occidentaux qui ont fortement ressenti le ralentissement de leurs approvisionnements originaires de Chine (cf. Sourcing textile 2020 : au coeur de la tourmente du coronavirus). Le risque sanitaire a contraint bon nombre d'usines à fermer leurs portes.
Outre les produits finis, ce sont tous les approvisionnements de matières premières originaires de Chine qui ont impacté les pays dépendants comme le Vietnam, la Thaïlande, le Cambodge, le Birmanie, l'Indonésie, l'Inde, le Bangladesh et le Maghreb…
Les importations ont repris depuis quelques semaines, mais à quel prix ?
Les taux de fret ont flambé à l'import comme à l'export, et c'est au tour de l'Europe d'être dans la tourmente avec des contraintes logistiques et douanières (cf. COVID-19 et Supply Chain : importations de matériel sanitaire à haut risque !).
Heureusement la dématérialisation des opérations en douane facilite le fonctionnement de la supply chain, mais certains documents papier étaient encore requis il y a peu.
Nous ne manquons pas de vêtements mais, quand bien même nos industries nationales pourraient produire du PAP "Made In France", elles sont désormais réorientées vers l'industrie de "guerre" destinée aux masques et autres vêtements de protection !
Du côté de la demande, le confinement et l’absence de consommateurs dans les commerces non vitaux condamnent les réseaux de magasins traditionnels, grandes chaînes autant que détaillants.
Seraient-ils restés ouverts que cela n'aurait d'ailleurs pas résolu le problème : les besoins en vêtements neufs ou saisonniers diminuent fortement quand on travaille à distance et à domicile. Pas besoin du costume ou d'une tenue de travail pour des RDV professionnels, et peu d'effet de mode pour se déplacer du fauteuil au bureau !
La chute du chiffre d'affaires de la filière mode est abyssal
Temporairement la vente à distance a bénéficié d'un appel d'air, mais les commandes chutent également pour cette filière : les plate-formes de vente en ligne font désormais face au manque de main d'oeuvre et de transporteurs pour des produits non vitaux.
Les marques font face à des problèmes de stocks de produits saisonniers dont l'utilité sera faible selon la période à laquelle le consommateur pourra retourner dans les magasins.
Une tension présente extrêmement forte et des prévisions inquiétantes : effet de trésorerie et de baisse de la consommation, les commandes pour les prochaines saisons vont être difficiles à ajuster.
La prise de conscience du consommateur des effets pervers de la mondialisation et de l’hyperconsommation, pourrait aussi faire changer les habitudes de consommation, bousculant à nouveau toutes les prévisions.
Les fabricants du monde entier ne vont pas tarder de mesurer cela à leur carnets de commande pour la saison automne/hiver 2020 : la baisse de trésorerie des marques réduira les possibilités d'ouverture de lettres de crédit, et les fournisseurs seront peu enclins à faire crédit.
Vers une nouvelle stratégie d'approvisionnement ?
A moyen terme, la crise du COVID-19 pourrait bien accélérer la redéfinition de la carte mondiale du sourcing. L'occasion pour les marques de repenser leur stratégie d'approvisionnement en s’intéressant de plus près aux attentes environnementales et sociales des consommateurs ?
Pour aller plus loin...
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Rédacteur(s) : A. LE ROLLAND | A.NIEMAZ
Source(s) : www.just-style.com
