Le Franc CFA : dernier vestige du colonialisme ou garant de stabilité économique ?

Atmosphère Internationale

July 2019

Franc CFA économie Afrique

Le Franc CFA vit-il ses dernières heures ? Pour quelles raisons ? Quelles sont les options envisageables ? Si le CFA est la devise de référence dans vos échanges commerciaux sur l'Afrique, quels sont les principaux enjeux ?

Thème :

RSE internationale & prévention de la corruption

Pays :

Afrique

Les débats se poursuivent sur les 2 monnaies appelées « Franc CFA », de parité fixe par rapport à l’euro mais non interchangeables qui couvrent l’Afrique de l’ouest et l’Afrique centrale.

Créé en 1945, le CFA est vu par de nombreux spécialistes africains ou français comme un frein au développement : trop rigide, il reposerait sur des mécanismes désuets.

Pour autant, sur fond de défis économiques, sociaux, politiques et démographiques, quitter les unions monétaires existantes et prendre son indépendance monétaire pourrait avoir des conséquences désastreuses pour certains pays. Alors comment faire ?

Plusieurs pistes sont envisagées :

  • Un nouveau nom pour une nouvelle identité... et un nouveau départ !
    Bien que représentant un coût financier certain, ce changement de nom contribuerait à la lutte contre le blanchiment et le commerce informel via la remise en circulation de sommes colossales accumulées (du fait de sa stabilité et convertibilité).
  • Ouvrir l’impression des billets à la concurrence : en reprenant la charge de l’impression en lieu et place de la Banque de France (par exemple par la BCEAO ?).
  • Supprimer les comptes d’opérations, qui doivent contenir 50% des réserves des Banques centrales des 2 zones.
    Designer via appel d’offres un établissement financier international chargé d’héberger les réserves en lieu et place du Trésor Français et en charge de garantir la convertibilité du Franc CFA.
    S’assurer que les intérêts permettent toujours de payer les frais de fonctionnement des banques centrales.
  • Changer le régime des changes : la parité face à l’euro ne permet pas la flexibilité nécessaire à la zone, ne traduit pas la compétitivité des pays de la zone, et pénalise les économies africaines qui subissent la fluctuation des cours du dollar US, monnaie de référence pour le cours des matières premières. 2 options possibles :

    • Instaurer un change flexible sans garantie extérieure
    • Arrimer la nouvelle monnaie à un panier de devise (euro, dollar, yuan ?) 

Avis de l'expert : 

Le Franc CFA n’est ni monnaie parfaite, ni l’origine de tous les maux du continent.

Toute évolution doit être impulsée directement par les chefs d’Etats et spécialistes de la zone Franc, en prenant d’indispensables précautions et en concertation avec toutes les parties intéressées.

Inclure la France, d’autres pays européens, des experts internationaux sera essentiel afin de ne pas déstabiliser la zone.  

Attention à ne pas négliger le « confort » apporté par le CFA : faible inflation, sécurité pour les investisseurs étrangers, risque de change nul (garantie d’obtenir des euros).

Également à ce jour les réserves déposées sur les comptes d’opérations sont supérieures au minimum requis par le Trésor, ces comptes étant mieux rémunérés que sur le marché (0.75%), sûrs et disponibles.

Notons que depuis 1983, la CEDEAO (Communauté Economique Des Etats d’Afrique de l’Ouest) tente également de mettre en place une monnaie commune.

Repoussé à quatre reprises, le projet sera à nouveau étudié en 2020 : un objectif réaffirmé le 17 juin dernier à Abidjan... mais rien n’est vraiment joué ! Et la France est condamnée au silence et à l’attentisme, sous peine de subir les vives critiques des « anticolonialistes » monétaires.

L’autonomie monétaire des pays africains ouvrira une période d’instabilité que les exportateurs / importateurs travaillant avec l’Afrique devront anticiper.

Utilisation de l’euro qui pénaliserait les échanges ? Du dollar qui ouvrirait grande la porte au Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) et aux poursuites des autorités judiciaires américaines en cas de corruption sur le continent ? Ou d'une monnaie africaine nécessitant de gérer des comptes en devise et des variations de taux de change ?

A l’heure du lancement de la cryptomonnaie LIBRA par Facebook, la création d’une nouvelle unité monétaire peut paraitre désuète, et pourtant ! Les Banques centrales du continent africain pourraient obtenir les marchés de la fabrication de monnaie. A l’instar de la banque centrale marocaine (Bank Al Maghrib) engagée dans les dernières étapes de sa Certification ISO 37001, il conviendra de mettre des dispositifs de prévention de la corruption dans les appels d’offres.

Pour aller plus loin...

ACTE International est un cabinet d’expertise stratégique, d’audit et de formation en global supply chain management, qui accompagne à travers le monde les entreprises dans l’établissement de cartographie des risques de corruption, le déploiement de dispositifs de management de la prévention de corruption, la formation des collaborateurs exposés et les pré-audits de certification.

Rédacteur(s) : M. DARIER | A. LE ROLLAND

Source(s) : Jeune Afrique N°3049 | www.jeuneafrique.com