Accord de libre-échange UE / Vietnam : entrée en application en 2018 ?

Atmosphère Internationale

avril 2018

ALE UE VIETNAM

L’accord de libre-échange (ALE) qui vise à favoriser les échanges commerciaux entre l’Union européenne et le Vietnam, grâce notamment à la réduction et/ou la suppression des droits de douane à l’importation sur une large gamme de produits, pourrait entrer en vigueur au cours du dernier trimestre 2018.

Thème :

Commerce international

Pays :

UE / VIETNAM / ASEAN

Les négociations de l’ALE UE / Vietnam ont été lancées en juin 2012 : le 1er février 2016, le texte de l'accord a été publié suite à l'annonce de la conclusion des négociations*. A l’issue de l'examen juridique actuellement en cours, la Commission européenne présentera une proposition au Conseil des ministres pour approbation de l'accord et ratification par le Parlement européen.

Les droits de douane à l’importation seront supprimés progressivement dans un délai de 7 à 10 ans, mais les exemptions totales couvriront déjà une large plage de positions tarifaires dès l’entrée en vigueur de l’accord.


 Rappel

Le Vietnam fait partie du Système Préférentiel Généralisé (SPG) de l'UE : dans le cadre du projet initial, l'entrée en application de l'accord économique global impliquait l'exclusion du Vietnam de la liste des pays bénéficiaires du SPG (cf. Atmosphère Internationale d’août 2015). Cependant, il est maintenant prévu une période transitoire de 2 ans durant laquelle SPG et ALE vont coexister.


Au-delà de son impact direct sur les barrières tarifaires, cet accord économique global est, à plus d’un titre, présenté comme un modèle du genre. Il s’inscrit dans la nouvelle approche de la politique commerciale commune, englobant notamment les obstacles non tarifaires au commerce, les investissements directs étrangers (IDE), ainsi que des notions sociales, éthiques et environnementales (cf. Atmosphère Internationale d’octobre 2016).

L'UE a une balance commerciale nettement déficitaire avec le Vietnam : en 2016, les exportations vietnamiennes à destination du territoire communautaire comptaient pour près de 80% des échanges globaux de marchandises entre les deux partenaires.

Toutefois, le Vietnam a connu une transformation économique et sociale radicale au cours des deux dernières décennies, parallèlement à son intégration dans l'économie mondiale (cf. Atmosphère Internationale d’octobre 2008). De plus, en tant que membre de l’ANASE**, le Vietnam dispose d'un potentiel considérable pour les entreprises de l'UE (cf. Atmosphère Internationale d’octobre 2016).

* "EU-Vietnam Free Trade Agreement: Agreed text as of January 2016" : document à disposition de nos abonnés sur simple demande.

** ANASE – ASEAN (Association des Nations de l'Asie du Sud-Est) : Brunei, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar (ex-Birmanie), Philippines, Singapour, Thaïlande et Vietnam.

Avis de l'expert : 

Si l'ALE UE / Vietnam semble a priori en bonne voie, l'échéance de fin 2018 pour son entrée en application apparaît très ambitieuse pour plusieurs raisons :

  • L'accord UE / Canada (CETA), entré "provisoirement" et "partiellement" en application en septembre, court toujours le risque d'être suspendu : certains Etats membres de l'UE s'opposent encore à son déploiement et refusent de ratifier le traité (cf. Atmosphère Internationale de  février 2018)! Un contexte de tension peu propice à un consensus rapide et unanime sur le dossier du Vietnam, même si les enjeux commerciaux et industriels y sont moins clivants....
  • De fait, selon nos sources, l'objectif de fin 2018 pour l'entrée en application de l'ALE UE / Vietnam ferait encore débat au sein même de la Commission européenne.
  • Les négociations avec le Vietnam sur le volet "éthique et social", concernant principalement les sujets liés aux conventions de l'Organisation Internationale du Travail (OIT), n'ont toujours pas abouti.

D'un point de vue technique, la franchise de droits de douane accordée à l’importation ne concernera que les produits conformes aux règles de l'origine préférentielle ratifiées par les deux partenaires (cf. Atmosphère Internationale de mars 2014).

Quelles sont les preuves d’origine applicables aux produits remplissant les conditions de l’origine préférentielle ?

A ce jour, l’article 15 du protocole origine de l’accord UE / Vietnam prévoit 3 possibilités :

  1. Certificat d'origine EUR.1 ;
  2. Déclaration d’origine établie par un Exportateur Agréé
    (ou tout exportateur si la valeur totale de l’expédition n'excède pas 6000 EUR) ;
  3. Attestation d'origine établie par un Exportateur Enregistré conformément à la réglementation REX (Registered EXporter).

Attention

La coexistence de la « déclaration d’origine » (EA) et de « l’attestation d’origine » (REX) pour la justification de l’origine préférentielle peut porter à confusion ! A l’instar de l’accord CETA entre l’UE et le Canada, il y a fort à parier que la preuve d’origine qui sera privilégiée in fine dans le cadre de l’ALE UE / Vietnam  sera, du moins pour les exportateurs communautaires, la réglementation REX (cf. Atmosphère Internationale d’avril 2017).


D’un point de vue macroéconomique, la relation UE / ANASE est au cœur de la stratégie diplomatique de l’Union européenne en Asie du sud-est, tant le développement de cette région du monde est rapide. La nécessité de contrebalancer la stratégie américaine dans la zone Pacifique fait partie des motivations de Bruxelles pour accélérer les négociations.

Ainsi, l’ALE UE / Vietnam n’est-il qu’un point d’étape vers un accord régional global qui reste l’objectif  à terme : les représentants de l'Union européenne et de l’ANASE ont d’ailleurs conjointement déclaré en mars 2018 vouloir reprendre les négociations sur ce projet. Prochain pays ciblé par l'UE dans sa course aux accords bilatéraux en Asie du sud-est : Singapour !

Voir aussi : Import / export : dans la jungle des accords commerciaux de l'UE... (mars 2018)

Pour aller plus loin...

Source(s) : Réseau ACTE International | www.europarl.europa.eu | oxfordbusinessgroup.com

Rédacteur(s) : Z. MAZID | D. LE GRAS