Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème RSEE INTERNATIONALE
 Pays CONGO (RDC) / MONDE  Date février 2016

Risque éthique : la supply chain du cobalt, un cas d'école !

Synthèse : L'enquête d'une ONG sur la supply chain internationale du cobalt a récemment secoué les leaders mondiaux de l'électronique et de l'automobile : les conditions d'extraction de ce minerai y sont jugées contraires aux droits humains dans le principal pays producteur, la République Démocratique du Congo. Or, aucune marque interrogée n'a été en mesure d'indiquer l'origine du cobalt intégré dans les batteries rechargeables de ses produits high-tech...

Le rapport publié le 19 janvier dernier sur le site Web de l'ONG Amnesty International* retrace le parcours, de la mine au consommateur, de ce minerai essentiel pour fabriquer les batteries lithium-ion équipant smartphones, ordinateurs portables et voitures électriques, etc...

La République Démocratique du Congo (RDC) fournit la moitié du cobalt utilisé dans le monde grâce à ses mines situées dans le sud-est du pays (Katanga) : le travail des enfants y est monnaie courante et les conditions de travail y sont catastrophiques, pour des salaires journaliers de 1 à 2 USD.

Les négociants peu regardants achètent ce minerai brut pour le revendre à la filiale congolaise d'un géant chinois de l'exploitation minière. Une fois traité, il est fourni à trois fabricants de composants asiatiques qui les commercialisent à des fabricants de batteries, eux-mêmes fournisseurs des leaders mondiaux de l'électronique.

Sur les 16 multinationales interrogées dans le cadre de l'étude, aucune n'a été en mesure de fournir une information claire sur la provenance du cobalt présent dans ses produits.

Le cobalt ne fait pas partie des quatre "minerais du conflit" (tantale/coltan, étain, tungstène et l'or) réglementés par la loi américaine "Dodd-Frank Act", qui oblige les entreprises à déterminer si certains minerais contenus dans leurs produits contribuent aux conflits ou aux violations des droits humains en RDC et dans les pays voisins.

* " This is what we die for : Human rights abuses in the Democratic Republic of the Congo power the global trade in cobalt " (Amnesty International & Afrewatch - janvier 2016) à disposition de nos abonnés sur simple demande.
Avis de l'expert : Le cas spécifique de la supply chain internationale du cobalt est une illustration forte du risque éthique au sein d'une économie mondialisée. Que ce soit par choix stratégique ou par négligence, tout manque de traçabilité et/ou de transparence dans la chaîne d'approvisionnement crée potentiellement une brèche favorable à la violation des droits humains, la mise en danger des travailleurs, l'atteinte à l'équilibre environnemental, et même aux actes de corruption.

De ce point de vue, les produits les plus sophistiqués et les plus "haut de gamme" ne sont pas (forcément) les plus vertueux. Un constat d'autant plus alarmant que les dégâts du cocktail "high-tech/low-sourcing" peuvent se révéler dévastateurs en termes d'image pour les entreprises qui ne scrutent pas attentivement l'autre bout de leur supply chain....

Car c'est bien le manque de vigilance et de diligence raisonnable qui est reproché à ces multinationales : elles n'ont pas suffisamment identifié les risques de dommages sociaux et d'atteintes aux droits de l'homme découlant, directement et indirectement, de leurs activités.

Il est vrai que des produits très élaborés techniquement, faisant appel à plusieurs technologies de pointe et intégrant un nombre très important de composants eux-mêmes conçus à partir de multiples matériaux, compliquent fortement la maîtrise des risques !
Dans le scénario du cobalt il faudrait que le donneur d'ordre soit en mesure de remonter toute la filière industrielle jusqu'à la matière première... Hors les référentiels internationaux en matière de diligence raisonnable s’en tiennent pour l’instant aux dernières étapes de production (fournisseurs de rang 1 à 2) !

En conséquence, plutôt qu'une tentative d'approche exhaustive de tous les niveaux de la supply chain globale, une approche sélective semble mieux adaptée dans ce contexte : ainsi la cartographie des risques pourra être établie sur des critères objectifs tels que le profil RSE du pays fournisseur, le type d’étape industrielle qui s'y déroule, les problématiques et incidents déjà exposés par les organisation internationales, syndicales et les medias,... Afin d'identifier les "points chauds" par une vision horizontale et non verticale de la chaîne d'approvisionnement.

Dans le cas du cobalt, cette méthode aurait sans doute mis en évidence que même si ce minerai n'est pas classifié "minerai de conflit", il est notoirement extrait dans la même zone géographique et dans des conditions similaires !
Notons d'ailleurs que l'OCDE a joué un rôle très actif sur le sujet des minéraux issus des zones de conflit ou à haut risque en produisant deux guides**, dont un spécifiquement consacré à la RDC, afin de donner aux entreprises concernées les clés d'une démarche de diligence raisonnable...

** Guide OCDE sur le devoir de diligence pour des chaînes d'approvisionnement responsables en minerais provenant de zones de conflit ou à haut risque
Mineral supply chains and conflict links in eastern Democratic Republic of Congo


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Source(s) : www.novethic.fr (janvier 2016)
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