Atmosphère Internationale
la lettre de veille stratégique du commerce international
 Thème MARCHES & TENDANCES
 Pays MONDE  Date octobre 2010

Mode / Habillement : une filière sens dessus dessous ...

Synthèse : Avez-vous une vision claire de la situation mondiale de la filière mode / habillement aujourd'hui ? Etes-vous capable de définir la répartition des risques et du pouvoir décisionnel sur l'ensemble de la chaîne ?

Le représentant en Chine d'une société américaine spécialisée dans les logiciels de gestion des chaînes d'approvisionnement a récemment dressé un bilan de l'environnement mondial de la filière, et mis en évidence un mouvement d'inversion complet de son organisation : en voici une courte synthèse.

Avant 1960, les fabricants de matières sont maîtres de la filière.

De 1960 à 1970, les fabricants de vêtements et les marques prennent la main : première situation d'excès d'offre, par rapport à la demande des détaillants.

Après 1970, les détaillants déterminent le rythme et les modalités de production de la chaîne d'approvisionnement : deuxième situation d'excès d'offre par rapport à la demande des consommateurs.

2008 : c'est le consommateur et son comportement d'achat qui dirige la filière. Une période favorable à la "Fast Fashion" qui réduit le délai de mise sur le marché ("Time to consumer"). Le facteur clé de réussite ? Transformer les stocks en actifs circulants !

Cinquante années au cours desquelles le risque a été transféré d'un maillon à l'autre de la chaîne… et qui condamne maintenant l'ensemble des intervenants à subir plutôt qu'à maîtriser ce risque ! Un bouleversement annoncé mais précipité par la crise financière de 2008 ...

Avant la fin de la crise, plus de 50% des entreprises du secteur de la mode auront changé de mains. Aujourd'hui, la marge commerciale réside moins dans la négociation des achats que dans les stratégies de marketing (multi réseaux de vente nécessitant des outils informatiques innovants et performants) et les politiques de prix de vente (promotions, soldes, réductions…).
Avis de l'expert : Un état des lieux historique auquel on pourrait ajouter de nombreux autres bouleversements contextuels :
  • L'émancipation politique, industrielle et sociale, progressive mais bien réelle, des pays de production à bas coût.

  • La baisse du niveau d'exigence qualitatif vis-à-vis des sous traitants, induite par les stratégies de sourcing "low cost"

  • L'augmentation des prix des matières premières et des coûts logistiques

  • La pression des consommateurs sur la responsabilité sociale et environnementale des entreprises

  • Les restrictions normatives et les mesures sécuritaires mises en place aux frontières des pays occidentaux

  • L'atonie de la demande mondiale qui durcit la concurrence internationale pour les parts de marché existantes

  • L'obligation de disposer de trésorerie ou de fonds propres suffisants pour s'engager tôt, ou tenir une position à marge réduite plus longtemps que les autres…
Force est de constater que l'ensemble de ces éléments crée un climat de tension propre à accentuer les réflexes de transfert du risque, plutôt que sa répartition équitable entre les différents maillons de la chaîne ...

Pourtant cette notion de risque est fondamentale pour le commerce : elle est un atout majeur dans les négociations et détermine l'équilibre des forces entre partenaires. Il faut donc croire que ce n'est pas tant la filière qui est en mutation, mais bel et bien la définition du commerce en temps que tel.
Imprimer  A. LE ROLLAND / M. ANTIER
Source(s) : Textile Asia (août 2010)
Tous droits réservés © ACTE International (2010)  |  www.acte-international.com