20 novembre, 2025
Paquet Omnibus : recul sur la CSRD et la CS3D, mais une exigence de durabilité toujours stratégique

Le Parlement européen a voté un affaiblissement inédit des directives CSRD et CS3D. Malgré ce recul réglementaire, les entreprises ont tout intérêt à poursuivre leurs efforts ESG pour rester compétitives et résilientes.

Le Parlement européen a voté, le 13 novembre, une série d’amendements inédits qui affaiblissent les deux piliers de la durabilité des entreprises : la CSRD (reporting de durabilité) et la CS3D (devoir de vigilance).

Sous couvert de simplification, ces reculs, adoptés dans le cadre du paquet “omnibus”, marquent une rupture dans la dynamique du Green Deal européen.

Un vote historique… et controversé

Le nouveau texte, soutenu par une alliance entre la droite et l’extrême droite européenne, relève fortement les seuils d’application : seules les entreprises de plus de 1 750 salariés seraient désormais concernées par la CSRD, et celles de plus de 5 000 salariés par la CS3D.

Les eurodéputés ont également supprimé l’obligation de plan de transition climatique et le régime de responsabilité civile européen permettant de sanctionner les atteintes sociales et environnementales dans les chaînes de valeur.

Pour Caroline Neyron, directrice générale du Mouvement Impact France, ce vote représente « un contresens économique et stratégique, qui porte un coup à la compétitivité de nos entreprises et à notre souveraineté européenne ».

En effet, en retirant aux entreprises un cadre commun et harmonisé pour piloter leurs enjeux ESG, l’Europe fragilise paradoxalement celles qu’elle prétend soulager.

Un recul qui ne protège pas les entreprises, il les fragilise

Selon une étude Tennaxia 2025, 83 % des entreprises qui sortiraient du champ de la CSRD prévoient de continuer à publier un rapport ESG.

La plupart ne le font pas par contrainte réglementaire, mais pour répondre aux attentes de leurs clients, investisseurs et partenaires financiers.

Près de 70 % considèrent même que la CSRD est une opportunité de transformation de leur modèle économique.

De la même manière, une enquête WeAreEurope révèle que près d’une entreprise française sur deux voit dans la CS3D un levier de compétitivité, contre seulement 12 % qui la perçoivent comme une contrainte.

Ces chiffres montrent que la structuration RSE et la transparence ne sont plus seulement une question de conformité, mais de résilience et de performance à long terme.

Comme le résume Alexis Kryceve, président de WeAreEurope, « en l’absence d’un cadre clair et harmonisé, les entreprises devront surveiller seules des sujets hautement stratégiques : risques, impacts et opportunités ESG. Cela leur coûtera du temps et de l’argent qui pourraient être bien mieux investis. »

Continuer à avancer : un choix de compétitivité

Ce vote ne signe pas la fin de la transition durable.

Il marque plutôt un retour de responsabilité individuelle : celle de chaque entreprise à choisir sa voie.

Certaines verront dans l’allègement réglementaire une occasion de lever le pied ; d’autres y liront un signal pour consolider leur stratégie ESG et renforcer leur avantage concurrentiel.

Les entreprises qui continueront à structurer leur gouvernance, à publier des données fiables, à maîtriser leurs risques ESG et à engager leurs partenaires seront celles qui resteront les plus solides dans un contexte mondial incertain.

« Celles qui voient la durabilité comme un fardeau continueront de la subir.

Celles qui la voient comme un levier de compétitivité, d’adaptation et de robustesse seront mieux armées pour l’avenir », conclut Alexis Kryceve.

 

En résumé :

Le recul européen n’exonère pas les entreprises de leur responsabilité, il renforce leur intérêt à agir.

Dans un contexte où les marchés, les clients et les investisseurs attendent toujours plus de transparence, la durabilité demeure une boussole stratégique, même si Bruxelles, pour un temps, semble l’avoir égarée.

Source :

Novethic (13 et 14 novembre 2025), Tennaxia 2025, WeAreEurope.

Rédacteur : Johanna Bantman